Jack Daniel’s et Harley-Davidson, deux noms indissociables de la culture américaine ! J’ai eu l’occasion de les rencontrer lors d’un voyage dans le Tennessee à Nashville.

une Harley-Davidson parachutée en 1944, refaite par Didier, un Versaillais qui restaure ou reconstruit des motos

« Quand je sens en chemin – Les trépidations de ma machine – Il me monte des désirs – Dans le creux de mes reins » chantait Brigitte Bardot en 1968 à la télévision. C’est dire si le mythe Harley-Davidson est inscrit dans la mémoire collective française depuis longtemps, depuis que les américains en ont parachuté les premiers modèles sur le sol français en 1944.

J’ai bien sûr eu l’occasion de piloter plusieurs fois ces motos, mais pouvoir en conduire une sur le sol américain, dans la région de Nashville, berceau de la musique country, était une opportunité à ne pas rater ! Encore un rêve de gosse !

Boswell's MotorcyclesJ’ai trouvé mon bonheur chez Boswell’s, l’immense concessionnaire HD de Nashville qui en propose à la location. Au départ j’avais demandé une Softail Heritage Classic avec ses sacoches cloutées, mais impossible d’y brancher un GPS, indispensable là-bas. Mon choix s’est donc porté sur une Street Glide, à la ligne basse avec son pare-brise court, moins imposante que l’Electra Glide, et équipée d’une prise type allume-cigare.

L’affaire est vite conclue. Boswell’s prête même des petits casques courts, suffisants aux USA où de nombreux états ne l’imposent pas, et on me demande juste de faire un rond sur le vaste parking de la concession avant de me laisser partir.

Grand choix chez Boswell’s !

Harley-Davidson Street Glide

Le modèle présenté ici est une 2013. Elle est apparue aux USA à l’été 2005 pour être au catalogue 2006. La dénomination officielle est FLHX Street Glide. Elle a bénéficié de très nombreuses évolutions jusqu’à maintenant tout en gardant son style bagger.

Le style bagger pour une moto c’est d’être taillée confortable pour le voyage mais avec une élégance lui permettant de s’afficher dans les beaux quartiers urbains. « Né en Amérique, le style bagger consacre une machine de grosse cylindrée, basse, à la ligne épurée, débarrassée de tous les éléments considérés comme superflus ou inesthétiques. La devise de l’amateur de bagger est ″moins, c’est plus″. Pas de topcase (la petite valise fixée à l’arrière de la moto) ni de pare-brise monumental, ni d’accessoires inopportuns sur un bagger » écrivait Le Figaro en 2015.

 

Elle se démarque donc nettement de la prestigieuse et iconique Electra, même si on retrouve la même architecture générale et la même position de conduite.

Alors oui la Street Glide est une « grosse moto ». 370 kg en ordre de marche, avec 2 passagers et quelques bagages on dépasse largement la demi-tonne sur 2 roues. Mais venant du monde du Vmax, autre plomb motocycliste mythique, je ne suis pas impressionné, d’autant que l’assise est ici très basse et permet de poser les pieds bien à plat par terre, genoux légèrement pliés. 2 règles à respecter : à l’arrêt garder la moto droite pour ne pas se laisser embarquer et ne jamais se garer en pente en marche avant contre un obstacle ! Sinon, dès que ça roule tout va bien, simplement se souvenir du poids et respecter ses distances avec les voitures devant qui freinent mieux.

La moto fait par ailleurs 2,50 m de long et quasiment 1 m de large mais s’insère parfaitement dans la circulation américaine faite de très larges avenues et de highways, d’autant qu’on ne remonte pas les files, on reste à sa place comme une voiture. Les carrefours comme les parkings sont immenses et on n’a aucune difficulté à tourner. Sur route la moto est équipée d’un cruise control, régulateur de vitesse, qui permet de se caler tranquillement sur une vitesse. La vitesse est limitée aux US mais il n’y a pas de radar et il y a une bonne tolérance. Les américains roulent en général 10 mph au-dessus. Vous suivez les flux et il ne vous arrivera rien avec la police, elle aussi équipée Harley ou de grosses voitures, mais qui sera impitoyable si vous vous faites remarquer.

J’ai aimé cet état d’esprit sur les routes américaines à l’occasion de différents voyages, cette courtoisie et absence d’agressivité, ce côté cool à l’opposé de la crispation française.

Pour emmener pareil poids, la moto est équipée du traditionnel V-twin à 45° à course longue, culbuté avec 2 soupapes par cylindre et refroidi par air. Mais ici, il cube 1690 cm3, est alimenté par injection et sort 81 chevaux et 14 mkg de couple. Ca peut vous emmener à 160 km/h, largement suffisant pour attirer l’attention de la police locale et provoquer une poursuite toutes sirènes hurlantes !

La présentation de la moto est parfaite avec ses chromes rutilants et ses larges garde-boues qui évitent de les salir sous la pluie.

Derrière le pare-brise bas, on trouve un tableau de bord de Boeing des années 60 avec tout ce qu’il faut dans des beaux compteurs ronds cerclés de chrome. Y a même un poste encastré Harman Kardon avec des enceintes qui vous distillent les nombreuses radios country du coin, avec la particularité de régler automatiquement son volume en fonction de la vitesse. Au feu rouge, le son baisse pour ne pas importuner vos voisins sur la file d’à côté.

Notre moto est équipée de pare chocs latéraux au cas où la moto vous échapperait à l’arrêt et au retour à la concession le mécano de Boswell’s y passe simplement la main autour pour vérifier que vous ne l’avez pas couchée.

2 belles sacoches rigides carrossent l’arrière et permettent d’y ranger un peu de fourbi et les casques, même s’il ne viendrait à l’idée de personne là-bas de vous piquer quoi que ce soit laissé sur la selle.

Une belle antenne et un dosseret confortable pour le passager complètent le look de cette moto hors normes.

Le pilote dispose de vrais marche-pieds, d’un immense sélecteur pointe talon à gauche qui déclenche des clonks à faire sursauter un mort aux changements de rapport, et d’une pédale de frein qui ne dépareillerait pas une Cadillac à droite. Celle-ci commande d’ailleurs les freins avant et arrière via ABS.

Les suspensions sont pneumatiques à l’arrière, ce qu’a apprécié ma passagère qui ne monte plus sur mon Vmax depuis longtemps. Les freins sont quand même des disques fixes de 300 mm de diamètre, avec étriers 4 pistons Brembo, 2 à l’avant, 1 à l’arrière.

6 rapports de boite, transmission secondaire à courroie qui ne salira pas la moto. Le réservoir de 23 litres imposera des arrêts relativement fréquents sur longs trajets mais c’est toujours un plaisir de s’arrêter et de repartir avec une telle moto.

Rouler cool les pieds en avant en Street Glide entre le pom-pom du moteur et les accords de blues ou de country, c’est vraiment parmi ce qu’on peut faire de mieux aux US !

Pouvoir garer sa Harley sur Broadway, l’avenue principale de Nashville qui concentre tous les bars à orchestres country, est un plaisir qu’on ne se refuse pas :

 

Les contrastes américains avec ce troupeau d’Electra face à une carriole de Amish, 2 Electra Glide ayant appartenu à Elvis Presley, au Graceland de Memphis et une Harley de Johnny Halliday qui est venu ici bien sûr, et y a enregistré. Harley-Davidson est indissociable de la culture blues, country et rock :

 

Jack Daniel’s et Natchez Trace

Nous avons prévu plusieurs balades avec cette moto. La première est à 120 km dans une petite bourgade paisible : Lynchburg. C’est le siège de la distillerie mondialement connue Jack Daniel’s, fondée en 1866 par Jack Daniel et qui produit du Tennessee whiskey dans ses célèbres bouteilles carrées à étiquette noire. Vous pourrez serrer la main de Jack Daniel en personne, grandeur nature en bronze pour l’éternité.

La distillerie est implantée sur une source d’eau pure profonde qui sort des entrailles de la terre à 56 degrés au travers de différentes couches calcaires qui enlèvent le fer de l’eau.

Dans cette eau on va faire macérer pendant 6 jours une purée de maïs, d’orge et de seigle avant de la distiller dans de grands alambics. L’alcool obtenu est filtré au travers d’une couche de charbon de bois d’érable fabriqué sur place, on voit sur les photos les quantités de bois en attente d’être consumées. L’alcool est ensuite mis en barriques de chêne blanc américain, elles aussi fabriquées sur place, pour maturation, avant l’assemblage et la mise en bouteilles.

C’est cette utilisation d’eau et de bois spécifiques soigneusement sélectionnés et traités sur place qui donnent son goût au Jack. Car « le Jack Daniel’s n’est ni du Scotch ni du Bourbon, c’est du Jack », que l’on ne peut ni déguster ni acheter sur place. Le Comté de Moore où est implantée la distillerie est « sec » (dry county), c’est-à-dire que la vente d’alcool est interdite. C’est donc de l’orangeade qu’on vous sert à la fin de la visite 🙂

Hélas, les photos sont interdites dans de nombreuses zones de l’usine :

 

A midi nous nous rendons à pied chez Miss Mary Bobo’s dans une boarding house (pension de famille). Nous sommes accueillis dans ce qui semble être une jolie maison familiale par une dame d’un certain âge qui rassemble ses convives sur réservation autour d’une grande table conviviale, une dizaine de personnes, des touristes américains d’un peu partout. Des employés de Jack Daniel’s en bleu de travail complètent la table si besoin. La dame anime le repas et on nous sert une cuisine familiale ordinaire du sud du Tennessee. On se croirait un peu dans une scène du road movie Nebraska. Chacun se présente, dit pourquoi il est là. Nous sommes bien sûr les seuls français et tout Lynchburg saura l’après-midi que 2 français rodent dans le coin à moto.

 

Le lendemain nous allons faire un bout de la Natchez Trace, une petite route mythique qui traverse le Tennessee et le Mississipi, très prisée des bikers américains. Notre moto s’inscrit parfaitement et harmonieusement dans les grandes courbes vallonnées, sans rechercher de la performance qui amènerait inévitablement à frotter avec pareil engin.

 

La balade à moto est une belle façon de découvrir la campagne verdoyante du Tennessee avec ses arbres en fleurs (nous sommes en avril), ses grandes prairies vertes bordées de barrières blanches, ses demeures parfois somptueuses, ses mansions historiques, ses petits restaurants improbables de bord de route, ses stations-service perdues style Bagdad Café, mélange d’épicerie, de quincaillerie et de fast food.

Voilà, on reparlera une autre fois de Harley-Davidson sur ce blog, avec la mythique route 66…