C’est au fin fond de l’Aquitaine profonde que j’ai retrouvé cette perle devenue rare, polie par le temps avec 47 ans d’âge, mais à la mécanique impeccable.
Sa propriétaire a 89 ans et l’utilise encore. Elle l’a achetée neuve en août 1972, après que l’auteur de ces lignes lui ai mis sa Renault 8 d’alors sur le toit, et s’en sert pour faire ses courses, s’attirant la sympathie des passants et la convoitise d’acheteurs potentiels.
Je vous laisse la découvrir alors que je l’emmène à la station de lavage (la voiture, pas la mamie) …
Eh oui, c’est une Simca 1100 GLS.
Quelques manœuvres de parking imprécises l’ont légèrement marquée mais il n’y a rien de rédhibitoire et aucune trace de rouille apparente.
Le compteur affiche 80 000 km, un potentiel à peine entamé pour une auto réputée pouvant en faire 300 000.
À la conduite, la direction à crémaillère non assistée est digne en manœuvre d’un camion Berliet des années 60, puis s’allège considérablement avec la vitesse. Elle devient alors précise, ce qui, conjugué à son absence de jeu, vous met rapidement en confiance. Cette auto était réputée pour sa tenue de route à l’époque et même aujourd’hui, aucun roulis à vitesse raisonnable ne vient ternir le plaisir de conduite. MacPherson l’a épargnée et les suspensions triangulées à l’avant et les barres anti-roulis font leur travail de guidage avec d’originales barres de torsion qui remplacent les traditionnels ressorts hélicoïdaux.
Certes les montées en régime sont un peu lentes avec 60 chevaux seulement, mais sur les petites routes des Landes limitées à 80 cette voiture s’avère agréable à conduire, d’autant qu’elle ne pèse que 900 kg. Eh oui, à l’époque, pas de clim, pas de moteurs électriques ni d’assistances diverses et variées, pas de radio ni enceintes, pas d’ABS ni ESP…
Le moteur est donc un 4 cylindres 1118 cm3 (74×65 mm) à arbre à cames latéral et culbuteurs avec 2 soupapes par cylindre, distribution par chaîne, carburateur simple corps, et accepte du SP95. La vmax était donnée pour 146 km/h, ce qui convient bien finalement aux limitations d’aujourd’hui.
Sous le capot on trouve différentes plaques et la référence de couleur, le blanc Tacoma, un blanc ivoire un peu passé ici mais certainement facile à raviver. Il y a un réglage manuel été-hiver de l’admission d’air. Le compartiment moteur aurait juste besoin d’un petit nettoyage vapeur.
Les freins sont un peu durs bien qu’assistés (disques avant, tambours arrière).
Les pneus sont dans des dimensions d’époque… du 145/80 sur des petites roues de 13 pouces.
L’intérieur aurait juste besoin d’être dépoussiéré et lustré un peu. Les sièges en skaï rouge (un régal, gelés l’hiver, brûlants l’été !) sont impeccables et les moquettes propres. On redécouvre le tableau de bord en faux bois avec ses quatre cadrans ronds de même diamètre. L’aiguille blanche du compteur de vitesse gradué jusqu’à 180 tremblote un peu quand elle prend vie. Une pendule électrique à aiguille Veglia Jaeger à transistor, un thermomètre d’eau et une jauge à carburant à aiguilles complètent l’instrumentation tandis qu’à gauche, un compteur décoratif remplace le compte-tours des versions sportives (si !). Deux interrupteurs à bascule commandent l’éclairage et deux vitesses d’essuie-glace. La commande de lave-glace est un bouton à appuyer du pied gauche.
Dans l’étage inférieur du tableau de bord, on trouve la tirette de starter, un allume-cigare et les commandes de chauffage-ventilation. La tirette de capot avant est sous le volant. 2 tiges commandent les feux de route, clignotants et avertisseur à gauche du volant, fin cerceau de bakélite.
Le très long levier de vitesses à grande amplitude commande 4 rapports synchronisés et la marche arrière, sans craquement.
Cette auto était une des premières à être équipées de ceintures de sécurité rudimentaires, sans enrouleur, et qu’il fallait régler à sa corpulence.
Simca (Société Industrielle de Mécanique et Carrosserie Automobile) fait partie des dernières marques françaises disparues qui fabriquaient des voitures de grande série. Elle a connu une histoire compliquée. Créée par Fiat en 1934 pour distribuer ses voitures en France, elle absorbe Ford SAF en 1954 pour produire à Poissy (Yvelines) des autos de conception américaine (Vedette, Versailles…) puis construit des voitures populaires de conception française avec l’Aronde, la Simca 1000 puis la Simca 1100. La marque est reprise par Chrysler, puis par Peugeot qui la rebaptise … Talbot, une célèbre marque d’avant-guerre ! Ce marketing brouillon Simca-Chrysler-Peugeot-Talbot contribue à sa disparition en 1985 et elle fait désormais partie du patrimoine PSA avec son usine de Poissy (78).
La Simca 1100 fut la première traction avant de la marque. Elle a été construite à Poissy à 2 millions d’exemplaires de 1967 à 1981 et fut la voiture la plus vendue en France en 1972, année de notre modèle. Elle est inspirée de l’Autobianchi Primula avec sa traction avant moteur transversal, ses 4 roues indépendantes et ses suspensions à barres de torsion. Elle innove par sa conception 2 en 1 d’une voiture à hayon arrière, préfigurant les monospaces. Notre version GLS se distinguait par un équipement intérieur un peu plus fourni et des chromes extérieurs un peu partout.
Les Simca 1100 étaient moins affectées par la rouille que d’autres autos de l’époque mais bien sûr beaucoup ont fini à la casse. Les quelques exemplaires préservés comme celui-ci connaissent un regain de sympathie car tout le monde a eu un parent, ou un beauf à rouflaquettes, qui en a eu une et l’occasion de rouler dedans !
Et pour finir, écoutez-là…