Facel-Vega Facellia

Facel Vega Facellia

Alain est amateur d’anciennes et de voitures de sport en général. Il a donné à son fils une voiture héritée de son père qui l’a achetée neuve en 1961 : une Facel-Vega Facellia F2A.

Il s’agit donc bien d’une voiture de famille et elle sera peut-être transmise un jour à l’un de ses petit-fils. De plus cette auto est dans son jus d’origine et Alain se refuse à en faire refaire la capote ou la peinture d’époque, soigneusement entretenues et bien patinées par le temps …

Un peu d’histoire

Facel VegaFacel-Vega est une marque automobile française créée par Jean Daninos, alors directeur technique de Bronzavia, un sous-traitant aéronautique. Les Forges et Ateliers de Constructions d’Eure-et-Loir (Facel) vont produire des automobiles de luxe et de prestige pendant 10 ans seulement, entre 1954 et 1964 à Dreux, où l’on trouve encore un petit musée. Les voitures étaient équipées de gros V8 américains Chrysler.

Dès 1957, Jean Daninos lance l’étude d’une voiture plus petite, destinée à concurrencer les autres voitures de sport de moyenne cylindrée Alfa Romeo, Porsche et autres Triumph. La Facellia est présentée au musée Jacquemart-André et au Salon de Paris en 1959 avec Stirling Moss comme parrain. Elle est équipée d’un 4 cylindres 1600 de 115 chevaux SAE de fabrication Pont à Mousson, un sidérurgiste de la ville du même nom en Meurthe et Moselle. Hélas, une mise en production trop hâtive entraine de nombreuses casses moteur qui vont plomber la trésorerie de la marque, placée en liquidation en 1964.

Entretemps, la Facellia F2 sort en 1961 avec un moteur fiabilisé par la société Le Moteur Moderne. La voiture est rééquipée d’un moteur Volvo en 1963 (celui du break de chasse P1800) pour devenir la Facel III.

La voiture d’Alain

La voiture d’Alain a fait la couverture du magazine Auto Passion de mars 1996

Cette voiture a été achetée au concessionnaire Poch de Paris par son père pour l’anniversaire de ses 40 ans, comme voiture de loisirs, et mise en circulation le 16 juin 1961. Alain avait alors 14 ans. Sa mère avait une Simca Océane, autre cabriolet 2 places, et la famille descendait en vacances en convoi dans le sud-ouest !

Alain la reçoit en cadeau en 1971 pour aller à la fac, ce qu’il ne fera jamais par discrétion car il préfère la garder pour les vacances. Le moteur Pont à Mousson casse à 75000 km. Mal réparée par Alain et son beau-père, l’auto reste immobilisée 10 ans au sec. En 1982, la décision est prise de faire réparer le moteur par un mécanicien compétent qui voit immédiatement qu’il est insuffisamment refroidi et agrandit les conduits de refroidissement.

Son père décède et est inhumé un 16 juin 2001, 40 ans jour pour jour après la première mise en circulation de l’auto. Alain transmet la voiture à son fils et en partage désormais l’usage avec lui, pour des balades proches ou des sorties de club. Son fils la transmettra-t-il à l’un de ses enfants ?

Le modèle

Il s’agit d’une Facellia F2A, couleur gris « Dovergrey » et qui a été équipée par la suite d’un hard top noir trouvé d’occasion et adapté, car chaque hard top Facel était ajusté à chaque voiture.

Un cabriolet français au style sobre et intemporel signé Jean Daninos,
entre les excentricités anglaises et le style italien

Elle est donc équipée du moteur Pont à Mousson d’une cylindrée de 1646 cm3 pour rester en dessous des 9 chevaux fiscaux, mais qui rentre hélas en compétition dans la classe 1600-2 litres et s’affronte en course avec des moteurs plus puissants à l’autre bout de la fourchette.

C’est un bloc fonte, culasse alu à 2 arbre à cames en tête entraîné par chaîne, 8 soupapes, alimenté par un carburateur Solex vertical double corps. Ses 115 chevaux peuvent propulser cette voiture de 990 kg à 185 km/h, belle perf à l’époque.

La boite mécanique à 4 rapports est aussi Pont à Mousson mais particulièrement robuste contrairement au moteur. Le pont et l’essieu arrière rigide sont de l’anglais Salisbury sur ressorts à lames et amortisseurs télescopiques. On prendra garde à son bouchon de vidange proéminent et particulièrement exposé par la faible garde au sol.

Facel Vega Facellia
Pneus 185x70R14
Facel Vega Facellia
Les feux arrière « couteaux »

Le chassis est à 2 longerons et traverses avec une carrosserie acier. Les capots avant et arrière sont toutefois en aluminium. Autre originalité, les pare-chocs sont en acier inox. A l’avant on trouve une suspension classique à roues indépendantes, double triangulation, ressorts hélicoïdaux, amortisseurs télescopiques et barre anti-roulis.

Le modèle a subi diverses évolutions esthétiques et la voiture d’Alain est caractérisée par son tableau de bord granité noir à la riche instrumentation (Alain a remplacé la montre par une jauge de température d’huile), par ses doubles optiques Marchal à l’avant, ses feux arrière « couteaux » peu visibles et son bouchon de remplissage d’essence derrière la plaque d’immatriculation basculante (tiens, c’est pratique çà ! Mais elle se reflète sur le pare chocs…).

Facel Vega Facellia

Les freins sont les meilleurs de l’époque avec 4 disques et étriers Dunlop avec servo-frein.

Le capot en aluminium se soulève vers l’avant ou bien s’enlève comme sur une voiture de course et laisse apparaitre le 4 cylindres double ACT. Les propriétaires de Facel n’avaient pas besoin de doc papier, tout est indiqué sur de riches plaques sérigraphiées :

Facel Vega Facellia
Le bouchon de remplissage d’essence est accessible derrière la plaque d’immatriculation pivotante, qui peut être oubliée ouverte… 😉
La patine d’un cuir de qualité

Alain a conservé tous les documents d’époque : bon de commande, carnet de garantie et d’entretien, manuel utilisateur, plaquettes commerciales …

À la conduite

Alain a eu la gentillesse de bien vouloir me confier cette auto qu’il entretient comme la prunelle de ses yeux et ne sort que par beau temps, pour une petite balade en vallée de Chevreuse. Je suis seulement le 5 ou 6ème conducteur à avoir le privilège de la mener. Alain est mon mécano et navigateur pour cet essai, surveillant la route et les manos, comme aux grandes heures du Tour de France Auto ou de la Targa Florio ! Je peux donc me concentrer sur la conduite, sans autre souci que de prendre soin d’un quasi monument historique.

N’étant pas un essayeur professionnel, je ne vous en donne toutefois qu’un ressenti correspondant à ce que vous pourriez ressentir vous-même, dans un usage modéré d’une automobile de collection. L’absence de ceintures vous conseille la prudence de toute façon.

Ce qui m’a frappé d’abord comme passager est son confort et son espace intérieur. On est loin des étroits tape-culs anglais. La voiture passe bien les gendarmes couchés et vire à plat malgré la souplesse de la suspension.

Le confort se confirme à la conduite, à quelques détails près : le volant tulipé et de grand diamètre, presque vertical sur les Facel, a du mal à compenser la dureté de direction. Attention à ne pas se faire surprendre au début dans les tournants de carrefours. J’ai trouvé les freins particulièrement durs, comme sur une voiture de course, il ne faut pas hésiter à taper dedans et il vaut mieux anticiper les ralentissements car ils manquent de mordant au début de la course de la pédale. Les feux rouges et clignotants arrière « couteaux » étant peu visibles, il faut surveiller qui est derrière et bien anticiper tout ralentissement et changement de direction en n’hésitant pas à tendre ou lever le bras !


En Vallée de Chevreuse dans les 17 tournants

La boite de vitesse est franche, rapide et précise dans ses verrouillages. Les reprises sont correctes, l’allumage électronique monté par Alain ayant donné plus de souplesse au moteur.

Le bruit est … anglais et si l’ensemble peut se piloter avec vivacité, la voiture est avant tout taillée pour la balade à deux à allure modérée afin de limiter les turbulences capote ouverte. Dans ces conditions, la consommation n’excèdera pas 10 litres aux 100.

Le coffre est moins étriqué que sur une anglaise et la banquette arrière peut recevoir le surplus de bagages de Madame.

Sur la route, la voiture séduit et les têtes se tournent, confirmé par l’intérêt porté par les badauds dans les différents rassemblements auxquels elle participe. Vous la retrouverez souvent le 1er dimanche du mois dans le cadre historique de la place de la cathédrale à Versailles.


L’Amicale Facel Vega

Particularité unique dans le monde de la voiture de collection, ce club est propriétaire de la marque et se défend bec et ongles contre les prédateurs qui voudraient s’en emparer ! Extrêmement actif, il en est à plus de 1000 cartes de membres distribuées et Alain en fait partie depuis sa fondation en 1975.

Le club organise sorties et balades, est présent sur les événements, édite des goodies à l’effigie de la marque, fait refabriquer des pièces…

Le club pourra-t-il lutter longtemps contre ceux qui voudraient s’emparer de la marque ? Mais pourquoi ne pas imaginer sa renaissance avec un concept moderne reprenant les codes de la marque, à la façon de Bugatti ou d’Alpine ?

Au cinéma

Une Facellia a tourné au cinéma dans le film OSS 117 Le Caire, nid d’espions en 2006, avec Jean Dujardin et Bérénice Béjo, dans une livrée bleu clair pour mieux passer à l’écran et que le propriétaire qui l’avait louée à la prod a conservée. On l’aperçoit de temps en temps du côté de Versailles.

La Facellia d’Alain et celle d’OSS117
Photo Amicale Facel Vega

Une Facellia rouge bordeaux a tourné également dans les Petits Meurtres d’Agatha Christie saison 2 en 2013, aux mains du commissaire Swan Laurence (Samuel Labarthe, voix française de Georges Clooney).

Facel Vega Facellia
Élégance à la française